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Menthe Piment
11 juin 2015

Les stéréotypes de l'entreprise

Certains groupes font, plus souvent que d’autres, l’objet de stéréotypes négatifs. Dire que les stéréotypes s’appliquent à tout le monde ne revient pas à ignorer le phénomène de stigmatisation. Les groupes stigmatisés réunissent, la plupart du temps, deux caractéristiques : ils sont minoritaires et/ou représentent un pouvoir social faible. Quand ces deux éléments sont réunis, on voit souvent apparaître un phénomène de « bouc-émissairisation ». Ce qu’en dit la recherche : La théorie psychanalytique nous explique que ce mécanisme remonte au complexe d’OEdipe. Entre trois et six ans, l’enfant ressent des pulsions amoureuses envers le parent du sexe opposé. En clair, le petit garçon voudrait bien piquer la place de son père dans le lit conjugal. Mais il comprend vite qu’elle est déjà prise, ce qui le rend malheureux et surtout frustré de ne pouvoir satisfaire cette pulsion. Alors, il va transformer cette frustration qui s’accumule comme une énergie négative en une agression envers ce qu’il identifie comme la cause de cette frustration : son père. Il réalise que si son père mourait, ça lui laisserait le champ libre. C’est la douce période où le petit garçon joue à tuer son père toute la journée avec ses pistolets ou ses épées en plastique. Mieux encore, c’est la période des remarques adorables comme : « Papa tu sais, un jour je serai grand, et toi tu seras... mort. » Mais c’est aussi la petite fille qui passe ses journées à déambuler devant son papa avec les chaussures à talons hauts de sa mère. Dans l’immense majorité des cas, les choses se tassent assez facilement quand les deux parents font comprendre à l’enfant que ce à quoi il aspire est impossible. La théorie du bouc émissaire est très ancienne en psychologie sociale (Dollard et al., 1939) en partie héritière de la psychanalyse. Elle repose sur le phénomène assez universel « frustration-agression », reconnu de tous même si d’autres approches scientifiques le nomment autrement. Ce réflexe qui consiste à se libérer d’une frustration en la transformant en une agression inutile mais libératoire du point de vue de l’énergie est une défense que nous utilisons toutes et tous comme soupape quand le sentiment d’échec, de menace ou de perte de contrôle est trop fort. Mais parfois la source de notre frustration est impossible à identifier et donc à agresser. Par exemple, la situation dans laquelle se trouve un chômeur est le produit d’une multitude de causes qui s’accumulent pour provoquer son état. Cela peut provenir de son origine sociale, son rapport avec l’école, le contexte économique, un marché de l’emploi surchargé dans son secteur, un lieu de vie peu propice pour sa carrière, les lois, ou encore ses aptitudes physiques ou mentales. En outre, quand il est possible d’identifier la cause d’une frustration, celle-ci est parfois impossible à agresser pour des raisons de relation de pouvoir. En entreprise, on peut se voir refuser une augmentation, devoir accepter une mutation, subir une mauvaise évaluation ou encore devoir gérer un surplus de travail du fait de l’incompétence ou de la malhonnêteté de son supérieur hiérarchique. Mais que faire ? Comment agresser cette personne qui détient une forme de pouvoir sur nous ? Et quand bien même, cette agression aurait-elle un effet positif sur notre situation ? C’est loin d’être certain (pour une revue de questions, voir Herman, 2007). Alors quand la cause de notre frustration est impossible à identifier et/ou à agresser, il nous est nécessaire de déplacer cette agression sur une cible plus faible et facilement repérable. C’est injuste mais reconnaissons que cela fait du bien ! C’est le phénomène de la cascade dans les entreprises. On déplace sur les N – 1 les frustrations vécues à cause des N + 1 et ainsi de suite du haut jusqu’au socle de la pyramide. Du coup, tout le monde agresse tout le monde, ce qui n’est jamais bon indicateur de bien-être et de performance collective. Pire encore, on peut déplacer nos frustrations en dehors de l’entreprise sur des cibles innocentes : les conjoints et/ou les enfants.

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Quand on croit que cela va faire du bien, la menthe piment vous rappelle que c'est un piment. Comme l'actualité qui nous berce chaque jour et qui nous rappelle combien le monde est parfois pourri.
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